A l'évidence, tout le reste n'est qu'hypothétique. Sa "TVA sociale", c'est pour… octobre. Sa "taxe sur les transactions financières", c'est pour… août. Sa "banque de l'industrie" pour les PME, ses mesurettes sur le logement ou le relèvement du quota de jeunes en apprentissage dans les entreprises de plus de 250 salariés semblent autant de bouteilles à la mer jetées avant les élections.
Par contre, les futurs "accords compétitivité-emploi" sont, eux, à portée de main. Concoctée par l'UMP depuis plusieurs mois, la loi est quasi-prête. Inspirée de l'Allemagne et boostée en France par le patronat de la métallurgie (UIMM), son objectif consiste — soi-disant… — à préserver les emplois en modulant le temps de travail à la baisse ou à la hausse en fonction des aléas de la conjoncture, sans modification substantielle du contrat du travail, en imposant de travailler moins avec baisse de salaire, ou plus sans revalorisation salariale. Cette idée de génie fera une pierre trois coups : les 35 heures ainsi contournées seront indirectement abolies, tandis que l'Etat et les entreprises pourront réaliser de notables économies à la fois sur le paiement des heures supplémentaires et sur le financement du chômage partiel, au détriment des salariés à qui l'on demande de se sacrifier.
Il ne reste plus qu'à convoquer les partenaires sociaux pour qu'ils "négocient". Ce que François Fillon a fait : il leur donne deux mois. Dans ce cadre, bien évidemment, le patronat est en position de force avec la CFDT, son allié déguisé. En cas de "blocage idéologique" des partenaires sociaux — comprenez, des syndicats comme la CGT ou FO… —, le gouvernement tranchera : un texte sera présenté au Parlement pour «gérer la période transitoire» avant qu'un accord ne se trouve (la loi Larcher de 2007 impose, en effet, que les partenaires sociaux négocient avant qu'un texte social ne soit adopté, mais que des dispositions transitoires peuvent être prises «en cas d'urgence»).
«Je ne vois pas pourquoi l'Etat devrait s'immiscer dans un débat responsable à l'intérieur de l'entreprise», a justifié Nicolas Sarkozy. C'est pourquoi ces accords s'appliqueront «si une majorité de salariés se met d'accord dans une entreprise, pas une branche» pour «décider d'un délai de travail, pour décider de privilégier l'emploi sur le salaire ou le salaire sur l'emploi». Pour être valable, l'accord devra, comme tout accord d'entreprise, être signé par des syndicats ayant recueilli au moins 30% des voix aux élections, sous réserve que les organisations pesant au moins 50% ne s'y opposent pas. Mais si l'accord est signé, tout salarié devra s'y soumettre. Là aussi, le rapport de force est totalement défavorable au salariat. Et dans les entreprises où il n'y a pas de syndicat, la majorité des travailleurs, gangrénés par la peur du chômage, pliera devant son employeur.
C'est pourquoi la mise en œuvre, à trois mois des élections présidentielles, de ce projet particulièrement antisocial mérite la plus grande vigilance.
SH
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