jeudi 29 septembre 2011

La Révolution commencera par les prisons



Il se passe quelque chose, un je ne sais quoi qui commence, une nouvelle ère de révolte qui n’a qu’une envie, celle de s’enflammer comme cocktail Molotov géant. Un besoin de dire NON à toute cette répression absurde qui se met en place petit à petit et qui se renforce au fil des années dans toute la société. Une envie de dire NON à tout ces vieux politicards corrompus sûr d’être protéger derrière leurs flics et leurs millions gagnés sur le dos de toutes les exploitations et de la misère grandissante.






Oui dans le pays il se passe quelque chose comme les signes d’une révolte qui gronde et qui prend forme sans encore vouloir montrer son vrai visage ou dire son nom, mais qui assurément va mettre le feu aux poudres tôt ou tard.

J’ai sillonné la France ces derniers mois et partout j’ai rencontré la même énergie, la même volonté, parfois un peu confuse, mais toujours sincères, celle d’une jeunesse qui a une nouvelle conscience et qui est prête à se lever face à ce qui l’oppresse. Leur saine solidarité avec les exclus, les taulards, les étrangers fait honneur à leur vision de la liberté. Ils se sentent concerné, car ils se sentent eux aussi exclus, taulards ou étrangers, ils se sentent eux aussi prisonniers, muselés et ils voient bien le danger d’un système qui n’écoute plus personne et qui en toute impunité s’assois sur la gueule du peuple en se foutant totalement de ses aspirations, de ses souffrances ou de ses revendications.



Il se produit une radicalisation, une métamorphose de la pensée aux actes, c’est le début de quelque chose, d’une lame de fond naissante qui n’attend plus qu’une véritable occasion pour agir contre cette « ère sécuritaire » devenue, ces dernières années, l’outil ultime pour gagner toutes élections.

A force de tirer sur la corde, cette jeunesse a pris conscience de leur manque d’avenir et du peu de choix d’une autre vie, c’est ce qui m’a frappé le plus en parcourant le pays et en rencontrant pas mal de militants, dont les rangs ne cessent de grossir face à une idéologie étatique réactionnaire de plus en plus extrême.

Pas étonnant que ce mouvement qui émerge s’attaque aux symboles de la répression que sont les prisons, centre de rétention et EPM (établissement pour mineur), car la société que l’on nous propose n’est faite que de murs qui s’élèvent de plus en plus haut. La société devient insidieusement carcérale et cela n’échappe à plus personne, on se sent pris dans un étau que l’on serre comme un garrot.

« Une Bastille est tombée et ils en ont construit 200 autres ! », « Une usine qui ferme, c’est une prison qui s’ouvre »…*

« Tout commencera vraiment quand quelques murs de prisons tomberont, et c’est par là que débutera le véritable chemin vers la liberté »…*

De cela certains en sont déjà convaincu et ils sont de plus en plus nombreux à s’en persuader. Graffitis, affiches, textes et actes de sabotages se multiplient contre la construction intensive d’établissements pénitentiaires qui fleurissent un peu partout sur le territoire. Il est devenu maintenant évident que la prison, ainsi que tout système pour y aboutir, est devenu une cible, un enjeu, le véritable et seul ennemi du peuple, parce que la « taule » ne sert, aujourd’hui plus qu’hier, qu’à dresser une partie du peuple contre lui-même, tandis que ceux au pouvoir règnent sans partage en usant et en abusant de la peur, de l’intimidation et de tous les mensonges possibles pour maintenir coûte que coûte le contrôle social des masses.

Oui il se passe quelque chose et moi qui vient de si loin, qui ai vécu si longtemps à l’ombre des miradors, prisonnier sous des tonnes de bétons versées pour consolider les infâmes murs de prison, je vis cette envie d’horizon, comme une évasion naguère réussit, comme une nouvelle résistance qui grandit et qui s’amplifie… je suis comme un vieux retraité des geôles qui observe et sent la montée de cette brise, ce vent qui se lève et qui peut-être emportera tout…

* Graffitis lus sur quelques murs de la capitale et en province.
Laurent JACQUA
Pour tout contact laurentjacqua@yahoo.fr


Voici le texte original d'une affiche anonyme placardée dans les rues de Paris au mois de juin-juillet dernier :




La prison... On en a tous vague­ment une idée, un repor­tage à la TV, un énième assas­si­nat de l’admi­nis­tra­tion péni­ten­tiaire à la rubri­que faits divers des jour­naux du jour, de brèves indi­gna­tions à peu de frais par-ci par-là. On en entend tous parler, et on fait comme si cela n’exis­tait pas. Comme si chaque jour des dizai­nes de mil­liers d’entre-nous n’étaient pas les otages de l’État, seuls dans leurs péri­plescar­cé­raux indi­vi­duels, isolés de tous et répri­més en silence. Pourtant nous sommes tant à avoir un frère, une amie, un cousin en taule, à visi­ter un proche incar­céré au par­loir, nous sommes tant à finir par trou­ver cela banal. Un petit séjour en taule, après tout, on est pas mal à y avoir gouté, une fois, deux fois, trois fois ou plus, de près ou de loin, dans les faits ou par pro­cu­ra­tion.

Enfermer des êtres humains dans des cages de quel­ques mètres carrés pen­dant des mois ou des années, anni­hi­ler toute volonté en eux, les pres­ser comme des citrons, les briser, les empê­cher d’aimer, les har­ce­ler, les dro­guer, les frap­per, les juger, les tuer, les trai­ter comme per­sonne n’ose trai­ter de la merde et les sou­met­tre à un tra­vail de forçat ; la taule, c’est la bar­ba­rie dans toute sa bana­lité, c’est le règne total d’une poi­gnée de sadi­ques et de petits exé­cu­tants obéis­sants. C’est le der­nier souf­fle d’une balle qui vient se loger droit dans notre tête pen­dant que tout le monde regarde ailleurs, trop préoc­cupé par sa propre misère. C’est la manière par laquelle ce monde se venge contre ton anor­ma­lité ou contre la concur­rence. C’est une des maniè­res par les­quel­les ce monde force la paix.

La prison a au moins un mérite, avec elle les choses sont clai­res : pas de bla-bla ou pres­que, une société qui a besoin de pri­sons pour se main­te­nir est une société qui a déclaré la guerre à une partie d’elle-même. Une société qui s’enor­gueillit de gérer avec tant de vio­lence ces usines de mort est une société qui offre son cou à la guillo­tine de la révolte, qui jus­ti­fie la néces­sité de sa des­truc­tion. Ils auront beau réfor­mer les pri­sons en long et en large, pla­quer les cel­lu­les d’or, les cli­ma­ti­ser ou rac­cour­cir la taille des matra­ques, les coups feront tou­jours aussi mal et la prison res­tera le même pro­blème qu’elle aura tou­jours été. C’est l’audace de la liberté qui importe, pas la lâcheté du statu quo de l’amé­na­ge­ment de la contrainte.

Une prison acceptable est une prison qui brûle

On parle déjà d’une tren­taine de morts en déten­tion depuis le début de l’année. On ose encore nous parler de sui­ci­des et d’acci­dents... On ose insi­nuer qu’il est anodin de se pendre dans une prison, qu’il est anodin de mourir « acci­den­tel­le­ment » sous les coups des matons ou d’autres déte­nus. On nous parle de « sui­ci­des » pour faire croire que ce n’est pas l’Administration Pénitentiaire et l’État qui tuent. Mais nous affir­mons que chaque mort en prison est un assas­si­nat de l’Administration Pénitentiaire et de l’État. Considérer les choses autre­ment, c’est affir­mer queles condi­tions de vie du dehors et du dedans sont les mêmes. C’est affir­mer que la prison n’existe pas. Et pour­tant le dedans et le dehors ne se dif­fé­ren­cient que par leur degré d’inten­sité. La prison n’est rien d’autre que le reflet exa­géré de cette société qui se regarde dans un miroir gros­sis­sant.

Tout est pire que dehors en prison, et pourtant, tout est tellement pareil que dehors...

La même merde, les mêmes méca­nis­mes auto­ri­tai­res, la même domi­na­tion, la même vio­lence inhé­rente à la paix sociale, le même fichage, les mêmes rap­ports dégueu­las­ses entre les gens, qu’ils soient économiques ou sociaux.

Il est si dif­fi­cile de parler serei­ne­ment de la prison. Il est si dif­fi­cile de ne pas se lais­ser plom­ber par l’atmo­sphère pois­seuse qu’elle dis­perse autour de nos vies. Mais ce ne sont pas des larmes qui en vien­dront à bout, au contraire, on ne peut que se noyer avec des larmes. L’indi­gna­tion, elle, n’a jamais fait tomber un seul mur, et l’on ne vien­dra jamais à bout de la prison par le biais du Droit ou de la Loi, puis­que c’est de leurs pier­res qu’elle est cons­truite.

Dans cette société qui a besoin d’enfer­mer : pri­sons, psy­chia­trie, cen­tres de réten­tion, gardes-à-vue, inter­nats, écoles, mai­sons de retraite, camps huma­ni­tai­res, usines, hôpi­taux, cen­tres éducatifs fermés, barres d’immeu­bles, établissements de réin­ser­tion sco­laire etc. Dans cette société où cer­tains font le choix de deve­nir mâtons, juges ou flics, notre choix est clair : Feu àtoutes les pri­sons. Feu à l’État.

Les pri­sons doi­vent être détrui­tes une par une, pierre par pierre, maton par maton, juge par juge.

Détruisons les prisons en détruisant la société, parce qu’une société qui a besoin d’enfermer et d’humilier est elle-même une prison.

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