jeudi 21 juillet 2011

La Libye: une autre histoire (1 et 2)

Charge para a coluna et cetara 23/02/11 - Jornais  Jornais Tribuna do Paraná, Paraná Online e O Estado do Paraná Online


La Libye: une autre histoire (1)

Voici des documents qui contredisent les versions officielles occidentales des pouvoirs politiques relayés fidèlement par tous les médias occidentaux
Il est clair que les termes de la Résolution 1973 du Conseil de Sécurité de l'ONU ne sont pas respectés (et n'avaient aucunement été envisagés de l'être depuis le début, puisque dès le départ, il avait été question de "changement de régime", ce qui impliquait de renverser Kadhafi));


Il est évident que la coalition occidentale n'a pas plus eu l'intention de "protéger les populations civiles" des massacres prétendument commis par les troupes de Kadhafi qu'elle ne comptait "libérer les femmes afghanes" - voire éliminer les Taliban et instaurer la démocratie – ou empêcher Saddam d'attaquer l'occident avec ses armes de destruction massive imaginaires, ou lutter contre un "terrorisme" bien moins dévastateur que tous les crimes qu'elle commet au nom de la "démocratie";

Il est manifeste que les occidentaux ont sauté sur l'occasion qui se présentait (à moins qu'ils l'aient créée de toutes pièces, l'avenir nous le dira) pour aller détruire une fois de plus, un pays étranger –infrastructures, services publics, ressources naturelles et population civile compris: la routine, quoi.
Pendant ce temps, ces prédateurs commettent des crimes bien plus odieux que ceux qu'ils attribuent – mensongèrement, qui plus est - à ceux qu'ils envahissent, et détruisent entièrement des pays qui, bien que "dictatoriaux", étaient, comme l'Irak et la Libye, relativement prospères.

Un gâchis que rien, jamais, n'arrêtera?

En Libye, le conflit s'enlise, Kadhafi ne cèdera pas, c'est certain, la coalition, forte de ses armes hyper performantes, n'a plus qu'un objectif – totalement en dehors des limites fixées par la Résolution: assassiner Kadhafi, et ne sera satisfaite que quand elle aura installé un gouvernement fantoche à sa botte, composé de membres du CNT, parmi lesquels, d'anciens ministres de Kadhafi, de grands démocrates, s'il en est, et, je vous le donne en mille … des Frères Musulmans et d'Al-Qaïda! Oui, vous savez, ceux qui …
Grosso modo, tous les épouvantails que brandissent les occidentaux pour justifier les invasions.
Alors, changement de régime, certes, mais on peut se demander si la "population civile" y gagnera au change.
Ce ne serait pas aussi abject, on en rirait.

Victoire par Ramadan

Vu à Tripoli
par FRANKLIN LAMB

Quand on entre en Libye depuis la Tunisie, le trajet de 150 kms environ jusqu'à Tripoli offre une introduction fascinante, voire dérangeante à la situation actuelle à Tripoli. Le temps que j'arrive à mon hôtel, j'avais un goût dans la bouche comme si j'avais avalé du kérosène et mes vêtements empestaient également. La raison en est que la pénurie grave de produits pétroliers a conduit les Tunisiens et d'autres à transporter tout ce qu'ils peuvent à Tripoli pour remplir les réservoirs des milliers de voitures en panne d'essence arrêtées sur le bord de la route.

Pratiquement tous les coffres des voitures qui étaient fouillés aléatoirement à plus de 50 checkpoints entre Djerba, en Tunisie et Tripoli, en Libye, étaient bourrés de jerricans en plastique remplis d'essence. Beaucoup fuient, apparemment, et depuis ces trois derniers mois ils laissent sur cent cinquante kilomètres une sorte de brume et une odeur infecte. Certains camions, chargés de près de, disons, mille barils de 200 litres d'essence semblait prêts à se renverser, tellement ils étaient chargés, leur centre de gravité étant descendu au niveau des pneus. Du pain, des jouets d'enfants ainsi que des produits en conserve ou non périssables remplissent également de nombreuses voitures.

Les journalistes occidentaux restent en général dans leur hôtel et semblent prendre plutôt parti pour les rebelles. Ce qui est sûr, c'est que ce que raconte la BBC sur ce qui se passe dans les rues la nuit, ce sont des âneries. J'ai eu besoin de me servir d'internet à leur hôtel et je suis retourné au mien à 3h du matin et les rues étaient calmes avec une présence policière discrète aux carrefours importants. Actuellement, c'est très calme ici, la plupart des magasins sont ouverts et la population vaque à ses occupations.
Depuis le début des opérations de l'OTAN, il y a eu en tout 12.887 sorties, dont 4.850 missions de combat.

Le lundi 27 juin 2011, il y a eu 142 sorties et 46 missions de combat. Il y a en tout 17 navires de l'OTAN qui patrouillent la Méditerranée au large de la Libye. A ce jour, 1.546 bateaux ont été interceptés et il y a eu 127 abordages.

Parmi les armes utilisées en Libye, il y a des missiles anti-char, des bombes mk 82, 83 et mk 84, c'est-à-dire de 250, 500 et 1000 kg, et toutes sortes de missiles.

Un rapport du gouvernement libyen va recenser les actions terroristes et les crimes commis par l'OTAN contre la population civile, parmi lesquels, d'après lui, jusqu'à présent, les bombardements de 294 objectifs civils, qui, selon les chiffres du Croissant Rouge libyen, ont fait en tout 6232 victimes. Parmi ces cibles civiles, il y a eu, à Tripoli, la Société Libyenne des Trisomiques - une école qui offrait des séances d'orthophonie, des stages d'artisanat et des activités sportives pour les enfants handicapés - ainsi que l'Université de Nassar, des lieux d'habitations, des écoles, des centres médicaux et des entrepôts servant à stocker l'alimentation.
Il est interdit par les Conventions de Genève de bombarder ces sites, ce qui constitue, donc, des crimes de guerre commis par l'OTAN.

Un autre grand projet de documentation réalisé par des organismes internationaux devrait être terminé pour la fin juillet 2011.

Ceux qui ont rassemblé ces premiers chiffres détaillés sont, entre autres, le Croissant Rouge Libyen et la "Commission d'enquête sur les événements actuels en Libye". Quand le rapport de juillet sera publié, il en surprendra quelques-uns.

L'OTAN commence à manquer d'objectifs maintenant. Elle bombarde actuellement les agents de police de petits commissariats de villages qui sont postés à certains carrefours et ronds points. Quand on arrive à un checkpoint, il n'est pas éclairé et les agents sortent avec une petite lampe pour nous contrôler.
Le genre d'attitude qu'on rencontre le plus souvent dans les rues de la vieille ville, comme, par exemple, dans l'avenue Omar Muktar, c'est la méfiance et un fort soutien nationaliste à la Révolution Libyenne.
"C'est notre pays. Quel choix avons-nous si ce n'est de le défendre?" est le sentiment couramment exprimé.

Une femme m'a dit:
"dois-je enlever mon foulard blanc et l'agiter pour indiquer que je me rends quand les soldats de l'OTAN viendront dans mon quartier ou dois-je porter un foulard vert et leur tirer dessus? C'est clair, je choisis la deuxième solution".

Un homme d'affaires libyen, qui reconnait avoir plein de temps de libre actuellement, et qui a fait ses études à l'Université George Washington explique: "la Résolution 1973 du Conseil de Sécurité de l'ONU a autorisé la mise en place d'une zone d'interdiction aérienne en Libye pour soi-disant protéger la population civile de Mouammar Kadhafi. La vérité, c'est que nous avons besoin que l'OTAN annonce simplement: 'mission accomplie' et cesse, alors, de massacrer notre peuple "protégé".
Les mandats d'arrêts de la Cour Pénale Internationale (CPI) du 27 juin dernier lancés contre Mouammar Kadhafi, son fils Seif al-Islam Kadhafi, et le chef des services secrets libyens, Abdullah al-Sanoussi, même s'ils réjouissent les "rebelles" et l'OTAN, ne serviront probablement pas à engager des négociations entre les deux camps et ces mandats ne faciliteront certainement pas un changement de régime volontaire.
Selon toute vraisemblance, ces mandats auront l'effet inverse; le gouvernement libyen ignore, voire ridiculise, la très controversée CPI en dénonçant son objectif historique de s'en prendre aux dirigeants africains. C'est exactement ce qu'ont fait, à l'Hôtel Nasser de Tripoli, quelques heures à peine après l'annonce de l'émission des mandats d'arrêts, le ministre de la Justice libyen et un haut responsable des Affaires Etrangères, puis ils ont refusé de répondre aux questions de la foule de journalistes occidentaux dont se méfie la Libye, étant donné la masse des récents pseudo-articles de presse qui se sont avérés être des mystifications.
Le colonel Kadhafi et ses partisans affirment qu'ils parviendront à réunifier la Libye et, cela, probablement, avant le ramadan qui commence cette année début août.

Ils disent que les rebelles se battent de plus en plus entre eux et perdent le soutien populaire.
C'est le même argument qu'utilisent les “rebelles” pour expliquer que leur victoire est assurée avant la fin du ramadan également.

Mardi matin, au cours d'une longue discussion avec un haut responsable au QG du congrès du peuple libyen à Tripoli, le secrétaire général m'a dit que plus de deux millions sur les 3,5 millions de Libyens âgés de plus de 18 ans ont été armés et s'entraînent pour combattre les troupes de l'OTAN quand elles arriveront au sol.

Pratiquement tous ceux à qui on s'adresse assurent que Kadhafi ne s'enfuira pas, mais, s'il le faut, mourra en défendant son pays. Plus d'une fois, les hauts responsables ont affirmé avec confiance que Kadhafi sera encore là après que les électeurs américains auront éjecté Obama aux présidentielles de 2012.

Le soutien pour cette thèse se trouve dans le soutien apparemment très répandu dont Kadhafi semble bénéficier et également de certains "avantages" qui résultent d'une certaine fierté libyenne pour 5 millions de citoyens qui résistent toujours au bout de 100 jours de conflit contre 27 pays.

Les bombes de l'Otan ont soudé la population; obligé la population parfois trop confortable à regarder l'avenir en face - même sans Kadhafi; ont montré que les frappes des médias à coups d'histoires fausses ont plus d'impact, à certains égards, que les attaques militaires; montré que le "système arabe", c.-à-d. la "Ligue Arabe" ne vaut rien; montré que ce sont les pauvres de Libye qui croient à la révolution et qui lui restent fidèles.

Les rebelles ont révélé que les Frères Musulmans étaient associés aux Etats-Unis et a également montré la véritable nature des Djihadistes, d'Al Qaeda et de l'OTAN elle-même, que l'Union Africaine a un rôle-clé à jouer, que la Libye n'est pas divisible à cause de son interdépendance sociale et économique. La Libye doit réformer et rejeter le système FMI et tirer les leçons des erreurs qu'elle a commises en faisant confiance aux Etats-Unis et à certains pays en 2002 quand elle a renoncé à certaines armes et placé des milliards de dollars dans les banques américaines.

A cause de la crise, les femmes sont arrivées sur le devant de la scène, et en surprennent plus d'un, "prenant en main" de nombreuses fonctions gouvernementales et encourageant la population à défendre le pays. Les Libyens disent qu'ils doivent donner un coup de jeune à leur révolution et ne compter que sur eux-mêmes.

Presque tout le monde affirme que la Libye a été bernée lors des négociations et des accords de 2004 avec les Etats-Unis et les pays occidentaux. Ils reconnaissent qu'ils ont payé le prix fort en ce qui concerne les pertes de vies humaines et la destruction de leurs infrastructures.

La Libye compte également poursuivre son projet de monnaie basée sur l'or pour améliorer les relations avec les pays africains. Forcer l'ancienne puissance coloniale française à quitter la plus grande partie de l'Afrique est un des motifs pour la Libye de vouloir un changement de régime.
Le gouvernement libyen a des tas de documents censés avoir été pris aux rebelles. Etonnant si c'est vrai, dans la mesure où ils évoquent des armes que le gouvernement français aurait livrées aux rebelles par le port de Misurata et d'autres.
Source: "Victory by Ramadan" /Scenes From Tripoli%%% de FRANKLIN LAMB; June 29, 2011; Counter Punch
Franklin Lamb fait de la recherche au Liban
Et du même auteur: La guerre de l'OTAN contre les civils libyens; 8 juillet 2011

Cinq exemples récents des bombardements de l'OTAN contre la population civile, parmi ceux qui ont le plus marqué les habitants de Tripoli.

Le 13 mai 2011, une délégation de chefs religieux musulmans venus en négociateurs de paix rencontrer leurs collègues de l'est de la Libye a été bombardée à 1 h du matin dans son hôtel par des bombes MK 82.
Onze d'entre eux ont été tués sur le coup et 14 grièvement blessés. L'OTAN a prétendu que le bâtiment abritait un "centre de commande et de contrôle des opérations". Tous les témoins et le propriétaire de l'hôtel ont nié cette affirmation avec force. Un journaliste est allé interviewer le chef de la délégation, le Cheik Khalad Ali, à trois reprises pour avoir davantage de précisons. Il se remet actuellement de blessures à la jambe droite provoquées par des éclats de bombes et confirme le récit des témoins oculaires. L'OTAN a proposé d'indemniser les familles.

Le 20 juin 2011, au petit matin, 8 missiles et bombes prenaient pour cible la maison de Khaled Al-Hamedi et de sa famille. 15 personnes ont été tuées, parmi lesquelles la femme de Khaled, qui était enceinte, sa sœur, et trois de ses enfants. L'OTAN a déclaré qu'elle avait bombardé la maison parce que c'était un genre d'installation militaire. Les témoins, les voisins et les journalistes indépendants affirment qu'il n'y a jamais eu d'installation militaire dans la propriété.

Fin juin 2011, sur la route nationale à l'ouest de Tripoli, un autobus civil transportant 12 passagers était touché par un missile anti-char, tuant tous les passagers. L'OTAN a prétendu que les autobus civils sont utilisés pour transporter des militaires. Les observateurs étrangers jurent tous qu'ils n'ont jamais vu à Tripoli de personnel militaire, pas plus que des tanks, ou des véhicules de transport de troupes, ou même du matériel militaire. La police locale s'occupe de la sécurité dans les villes et les comités de surveillance de quartier de celle des banlieues.

Le 6 juin 2011, à 2h30 du matin, le complexe administratif central du Comité Supérieur pour l'Enfance au centre de Tripoli, était bombardé par en tout 12 bombes/roquettes. Ce complexe abritait le Centre National pour Trisomiques, dont la salle des archives, ainsi que la Fondation pour les femmes handicapées, le centre pour enfants handicapés et le Centre de Recherche National pour Diabétiques.

Le 16 juin 2011 à 5h du matin, l'OTAN bombardait un hôtel au centre de Tripoli, tuant trois personnes et détruisant un restaurant et un bar à narguilé.

D'après ce qu'ont dit, lors d'un briefing, le 8 juillet, les médecins de l'Hôpital Central de Sirte et l'association des avocats libyens qui représentent les victimes des atrocités commises par l'OTAN, de nombreux problèmes de santé ont pour origine les attaques de l'OTAN.

Parmi ces problèmes, le nombre de crises cardiaques est passé de 5 à 20 par mois, et il y a eu 300% d'augmentation de cas de diabète et d'hypertension artérielle en 2011 entre le 15 février et le 15 juin, par rapport à 2010 au cours de la même période.

D'après le prélat de l'église catholique de Libye, Giovanni Innocenzo Martinelli, un des chefs religieux les plus populaires dans ce pays à 99,5% sunnite, les fausses couches en Libye ont augmenté de façon spectaculaire: en un jour, à l'Hôpital de Tripoli, à la suite d'une série de bombardements de l'OTAN, en mars 2011, il y a eu 50 fausses couches et 40 décès.

Ces chiffres ont été confirmés le 5 juillet dernier par le docteur Mohamed Milhat, cardiologue au Centre Médical Britannique en Libye qui a indiqué qu'un grand nombre de personnes se plaignaient de maladies liées au stress.

L'histoire jugera sévèrement l'OTAN pour ses crimes. Espérons que les citoyens de tous les états membres de l'OTAN agiront pour mettre un terme à sa mission afin de protéger la population civile en Libye.
Traductions: emcee, blog des bassines et du zèle'''

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La Libye: une autre histoire (2)

Libye: les mensonges de la communauté internationale comme pour l'Irak, l'Afghanistan et tous les autres pays qui ont été envahis illégalement, ou dont le changement de régime a été imposé par les pays occidentaux, les Etats-Unis en tête, qui se sortent de ces crimes sans une égratignure.
Et dire que pour la Libye, pratiquement toute la gauche (enfin le peu qu'il en reste) était d'accord pour que l'ONU "protège les populations civiles" en Libye, soi-disant massacrées par Kadhafi.

La gauche est d'une naïveté confondante. A moins qu'elle n'ait aucune notion d'histoire, même récente.
Ou qu'elle soit cynique.
Traduction de "Rape, Mercenaries and Bloodbaths on the Scale of Yemen?" / The Media Blank Amnesty's Failure To Find Evidence In Libya
Par Media Lens / June 30th, 2011

Le viol, les mercenaires et les bains de sang à l'échelle du Yémen

Les médias occultent les conclusions du rapport d'Amnesty qui indique qu'ils n'ont trouvé aucune preuve des violences que la coalition accuse les forces de Kadhafi d'avoir commises en Libye
Dans l'Independent du 24 juin dernier, Patrick Cockburn publiait un article http://www.independent.co.uk/news/world/africa/amnesty-questions-claim-that-gaddafi-ordered-rape-as-weapon-of-war-2302037.html essentiel allant à l'encontre de la propagande officielle sur la Libye:
"Les organisations de défense des droits humains ont émis des doutes quant aux informations sur les viols à grande échelle et les autres violences perpétrées par les forces pro-Kadhafi, et qui ont largement servi à justifier la guerre de l'OTAN en Libye.
Les dirigeants de l'OTAN, les groupes d'opposition et les médias ont raconté une série d'histoires depuis le début de l'insurrection le 15 février, affirmant que le régime de Kadhafi avait ordonné des viols en série, utilisé des mercenaires étrangers et employé des hélicoptères contre les manifestants civils.
Amnesty et Human Rights Watch (HRW) ont enquêté sur ces déclarations et n'ont trouvé absolument aucune preuve.

Et pourtant, au début de ce mois, le procureur de la Cour Pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, a déclaré lors d'une conférence de presse:

"Nous avons des renseignements qu'ils mènent une politique de viols en Libye contre ceux qui s'opposent au gouvernement. Apparemment il (le Colonel Kadhafi) s'en est servi pour punir la population".
Hillary Clinton, la secrétaire d'état US, déclarait qu'elle était "extrêmement préoccupée" par les comptes-rendus sur le nombre de viols commis en Libye par les forces de Kadhafi.

En revanche, Donatella Rovera, conseillère spéciale d'Amnesty International chargée des crises et des conflits, qui a passé 3 mois en Libye après le début de l'insurrection en février, dit:
"Nous n'avons trouvé aucune preuve, ni une seule victime de viol, ni un médecin qui aurait entendu dire que quelqu'un avait été violé".

Liesel Gerntholtz, qui dirige la section des droits des femmes à HRW, déclare, concernant les accusations de viol: "nous n'avons trouvé aucune preuve".

L'enquête d'Amnesty n'a pas non plus trouvé la preuve qu'il y avait des mercenaires qui se battaient pour le compte de Kadhafi.

Rovera ajoute:

"Ceux qui ont été présentés aux journalistes comme étant des mercenaires étrangers ont été libérés par la suite discrètement. La plupart étaient des immigrés subsahariens sans papiers qui travaillaient en Libye".
Et les massacres? Cockburn écrit:
Au cours des premiers jours de l'insurrection en Libye, les forces de sécurité ont tiré sur (et tué) des manifestants et sur les gens qui assistaient à leur enterrement, mais il n'y a aucune preuve de massacres de civils à l'échelle de la Syrie ou du Yémen.

Pas tout à fait l'impression que donne l'avalanche de propagande médiatique.
Cockburn, suite à son article du 24 juin, a écrit un autre excellent article, le 26 juin: "ne croyez pas tout ce que vous voyez ou entendez dire sur Kadhafi". Au moment où nous écrivons, il n'y a eu qu'une seule réaction contrite aux articles de Cockburn, sur le blog de Roy Greenslade hébergé par le Guardian.
Greenslade y cite Cockburn, ajoutant seulement que ces révélations évidemment ne signifient pas que les troupes de Kadhafi n'ont pas commis de crimes.

Nous n'avons trouvé aucune autre mention dans les médias britanniques de cette information crédible qui conteste ces affirmations-clés qui ont justifié la guerre contre la Libye.
Mais un système médiatique qui a répercuté avec tant de zèle de telles allégations contre la dernière cible des violences occidentales ne doit-il pas également accepter de publier les preuves contraires?

Performance Médiatique – ces "Atrocités à vous retourner l'estomac"

Pour une fois, prenons, à titre d'exemple, le Sun, qui publiait un article de Lorraine Kelly, célébrité de la télé et animatrice de débats:
"De toutes les atrocités à vous retourner l'estomac dont on entend parler à propos de la Libye, la plus horrible est l'utilisation du viol en série comme arme de guerre.
Le despote Kadhafi est accusé depuis des années de nombreux crimes monstrueux. Mais maintenant, il est accusé d'avoir procuré des tonnes de pilules comme le Viagra, distribuées à ses soldats pour qu'ils violent leurs victimes de façon plus "efficace".
L'idée que des civils soient terrorisés par les soldats qui prennent des remèdes et qui sont littéralement poussés à violer est totalement monstrueuse et glace le sang".

Rovera, d'Amnesty, raconte que les rebelles qui ont rencontré les médias étrangers à Benghazi ont montré aux journalistes des boîtes de Viagra, affirmant qu'ils les avaient trouvées dans les tanks incendiés.
Cockburn conclut: "on ne sait pas trop pourquoi ces boites n'étaient pas calcinées".

Le Daily Mail et de nombreux autres médias ont repris ces mêmes informations ad nauseam.
Un article de fond du Guardian se montrait prudent en signalant la présence de mercenaires le 21 février:
"Si les informations largement répandues que des mercenaires africains sont utilisés pour tirer sur les Libyens sont exactes, il n'a pas beaucoup de scrupules à décimer son propre peuple"
Cette prudence avait disparu dans l'article de fond du 10 mars:

"Les attaques aériennes ne sont pas un facteur décisif dans les échanges de coups de feu entre les rebelles, les troupes loyales au régime de Kadhafi et les mercenaires".

Le Times est encore allé plus loin, prétendant que Kaddafi dépendait de mercenaires: "Son régime impose des atrocités encore plus monstrueuses contre le peuple libyen (et non pas, soit dit en passant, "son" peuple, car il ne dirige aucun gouvernement légitime et compte sur des mercenaires étrangers".

Un éditorial de l'Independent , le journal où écrit Cockburn, indiquait, le 21 février:

"le colonel Kadhafi aurait déployé des armes lourdes et des troupes de mercenaires africains pour tenter de reprendre le pouvoir".
Cockburn écrivait sur ces prétendus mercenaires:

"l'enquête d'Amnesty a conclu qu'il n'y avait aucune preuve là-dessus".
Concernant l'utilisation d'"armes lourdes", il n'y avait pas non plus de preuves "que des mitrailleuses lourdes antiaériennes ou des avions aient été utilisés pour tirer sur la foule. Les douilles qui ont été récupérées après qu'on avait tiré sur des manifestants venaient de Kalachnikovs ou d'armes de même calibre".
Rovera écrit:

"les responsables politiques n'ont cessé de parler de mercenaires, ce qui a indigné l'opinion publique et le mythe s'est poursuivi parce qu'ils ont été libérés sans publicité’.

Aucune leçon n'a été tirée (une fois de plus)

Il devrait être surprenant que ce soient Amnesty et Human Rights Watch qui dénoncent la propagande US-GB d'une manière que toute la meute des medias occidentaux a été incapable ou réticente à faire. Mais, comme nous l'avons signalé maintes fois, à de rares exceptions près, les journalistes ne sont que la chambre d'enregistrement du pouvoir. Sans doute, comme la démocratie s'est rapidement dégradée en Grande-Bretagne – les principaux partis politiques servant de plus en plus les mêmes intérêts particuliers – les journalistes sont devenus encore moins enclins à dénoncer les puissants.

Ces histoires de viols en série et de mercenaires brutaux rappellent l'affirmation infâme en 1990 que les soldats irakiens étaient entrés dans l'hôpital de Kuwait City, avaient sorti des centaines de bébés des couveuses et les avaient jetés au sol où ils avaient agonisé.
(… partie non traduite. Voir en bas de page)

Inutile de dire que les médias classiques n'ont tiré aucune leçon de tout cela et de bien d'autres affaires du même genre.

Si l'action des médias, destinée à faciliter une nouvelle fois un autre conflit sanglant contre un autre pays sans défense – à peine quelques années après les énormes mensonges de Bush-Blair sur l'Irak – était abominable, leur manquement à publier les conclusions d'Amnesty et de HRW dépasse l'entendement. Ce sont des sources extrêmement crédibles qui livrent des informations extrêmement polémiques (ce qui signifie qu'elles ont toutes été très soigneusement vérifiées) sur les prétendus crimes qui ont servi à justifier la guerre. Or, il n'y a eu pour toute couverture médiatique qu'un billet de blog.

Curieusement, cette histoire tombe à point nommé: alors que nous allons fêter notre dixième anniversaire le mois prochain, nous assistons à une des illustrations les plus frappantes de la servilité des médias vis–à-vis du pouvoir qu'il nous ait été donné de voir.

Traduction emcee, blog des bassines et du zèle ©des bassines et du zèle
Media Lens est un observatoire des médias britannique dirigé par David Edwards et David Cromwell. Le premier livre de Media Lens s'intitule: "Guardians of Power: The Myth Of The Liberal Media" (Les gardiens du pouvoir: le mythe des médias de gauche"). Et le second :" NEWSPEAK in the 21st Century" a été publié en 2009.

Rappel de l'histoire des couveuses et du Viagra, voir ici: les Contes à dormir debout de la propagande guerrière

http://blog.emceebeulogue.fr/post/2011/07/12/La-Libye%3A-une-autre-histoire-%281%29

photo : http://www.flickr.com/photos/claudio_doggy/5471022828/

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