jeudi 15 décembre 2011

Pour Evo Morales il faut démocratiser pour approfondir le changement



C’est hier que le président Evo Morales a inauguré à Cochabamba la “Première Rencontre Plurinationale pour Approfondir le Changement” qui est en train de transformer la société bolivienne. Ce que la presse appelle “Sommet Social” a réuni une assistance multiple de plus de 1000 délégués de divers mouvements sociaux de toutes les régions du pays, qui répondirent à un conclave dont la première phase durera trois jours et dans lesquels dix commissions de travail examineront autant de sujets et de défis cruciaux du moment actuel. Le Vice-président Alvaro Garcia Linera ainsi que des ministres et des hauts fonctionnaires du gouvernement national étaient présents dans ces commissions, apportant de l’information et surtout écoutant les demandes et plus spécialement les propositions que donnèrent à connaître les mouvements. Ces premières conclusions seront présentées et à nouveau discutées dans une série de réunions qui auront lieu dans les prochaines semaines dans les différents départements (provinces) de Bolivie, en préparation pour une seconde et définitive période de sessions entre le 10 et le 12 janvier et dans laquelle se fixeront les principales directives de l’agenda de transformations pour les années à venir.

Dans son discours inaugural Evo a souligné l’importance d’une discussion démocratique et plurielle pour consolider le processus de changements inaugurés depuis son arrivée au Palais Quemado en 2006. A la différence de la majorité des interventions des autres présidents ou chefs d’Etat en toute partie du monde, Evo a commencé la sienne en signalant ce que lui-même qualifie comme des erreurs commises par son gouvernement. Il n’a pas commencé à parler de ses succès mais de l’insécurité, des problèmes d’emploi, de la corruption dans certains éléments des échelons inférieurs de la bureaucratie, de la nécessité d’améliorer l’activité économique. Seulement ensuite il se consacra à énumérer les nombreuses réussites de sa gestion, avec des chiffres convaincants : quasiment deux millions d’enfants bénéficiaires du bon Juancito Pinto ; 800.000 anciens recevant une importante aide financière ; les progrès dans les programmes de santé et d’éducation publiques ; le renforcement des finances de l’Etat grâce à l’accomplissement du mandat populaire qui exigea la nationalisation des hydrocarbures ; le doublement du salaire minimum et la rapide transformation que fit la Bolivie cessant d’être un “état colonial mendiant” (ce sont ses mots), qui vivait des prêts pour payer ses employés publics, pour se transformer en un état plurinational qui pour la première fois dans l’histoire accumule des réserves d’une valeur de 12.000 millions de dollars, un chiffre surprenant si on prend en compte la taille de l’économie bolivienne.

Bien sûr qu’il parla aussi de politique : il indiqua dans un passage de son discours qu’avant il y avait des groupes et organisations qui se mobilisaient pour que les gouvernements fassent des travaux ; maintenant il y a des minorités très tapageuses qui “se mobilisent pour que le gouvernement ne les fassent pas. Mais nous devons les faire, en respectant la Terre-Mère : sinon, comment pourrions nous vivre sans industries, sans pétrole, sans gaz, sans mines ?”. A une époque où un organisme comme la Banque Centrale Européenne défait et fait des gouvernements en Grèce, en Italie et au Portugal, Evo affronte les défis de son gouvernement en approfondissant la démocratie, facilitant le dialogue horizontal entre gouvernants et gouvernés, et faisant vérité la maxime zapatiste de “commander en obéissant”. Cette saine inclination de s’unir avec son peuple, de se tonifier en écoutant ses critiques et ses propositions est une des raisons fondamentales de sa popularité. La droite n’est pas une option de gouvernement et son unique chance est le coup d’état ; la gauche hyper-radicalisée, pour sa part, montre une disproportion suspecte entre l’écho que ses féroces critiques à Evo rencontre dans les médias hégémoniques et son faible soutien des masses. Apparemment jusqu’à maintenant Evo demeure imbattable sur le terrain électoral, et s’il approfondit son agenda de changements il le sera encore plus.

Atilio Boron

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