A Athènes, employés de la compagnie publique d’électricité, usagers et élus s’élèvent contre cette taxe exceptionnelle imposée sous peine de coupure du courant alors que les ministères ne paient pas leur facture.
La police anti-émeute les a évacués jeudi matin, arrêtant au passage quinze personnes qui seront jugées le 30 novembre. Depuis quatre jours, des employés de la compagnie nationale d’électricité grecque (DEI, l’équivalent d’EDF) occupaient un bâtiment de l’avenue Mesogeion, dans le nord de la capitale. En fin de matinée, une cinquantaine de policiers bloquent toujours les issues, pas tranquilles. Les syndicalistes du GENOP restent rassemblés devant l’immeuble, sans essayer de le reprendre.
De cet endroit sont expédiés les avis de coupure destinés aux habitants qui n’ont pas payé leur facture. Depuis peu, ils peuvent aussi être privés de courant s’ils ne règlent pas la nouvelle taxe foncière exceptionnelle mise en place pour renflouer en urgence le budget de l’Etat. 70% des Grecs sont propriétaires.
Yanis, 36 ans, rencontré la veille à Athènes, nous avait donné son exemple. Il habite un appartement de 90 m2 dans un quartier pauvre, pour 350 euros par mois : “Alors que j’ai déjà payé ma taxe d’habitation et ma propriétaire la taxe foncière, elle doit régler la taxe exceptionnelle : 610 euros dans mon cas. Sinon, on me coupe l’électricité.”
En Grèce, où les prix s'approchent du niveau français pour des revenus bien inférieurs, le consentement à l’impôt est une donnée de moins en moins évidente. Contre les “taxes injustes”, le mouvement Den plirono “Je ne paie pas” se développe. L’accès à l’électricité cristallise l’énergie des habitants, des syndicalistes et même de certains élus qui appellent, à l’échelle d’un quartier ou d’une ville, à boycotter la nouvelle taxe. Des avocats montent des dossiers pour prouver son inconstitutionnalité. Yanis parle d’employés de DEI qui “remettent le courant” après le passage des compagnies privées dépêchées pour le couper, de “groupes d’habitants qui empêchent les coupures ou expliquent comment rétablir l’électricité”.
Des dizaines d’usagers font la queue dans tout le pays aux guichets de DEI pour tenter d’expliquer leur situation et obtenir un dégrèvement. Pour l’instant, l’Etat a cédé sur les invalides à 80%. “Mais les retraités, les chômeurs doivent payer !”, s’exclame Irina, prof de yoga du PAME (syndicat lié au Parti communiste grec) venue en renfort. Sous la pression, le gouvernement a promis d’exonérer les plus démunis de la taxe exceptionnelle.
Georgis, employé de la compagnie et ex-occupant de l’immeuble, dénonce une “punition collective” adressée à des familles entières. “Nous refusons de payer pour une dette qui n’est pas à nous. Moi, je n’ai rien signé.” Il fait le geste de la main, dans l’autre secoue un komboloï. Pour lui, la Troïka ressemble à “une force d’occupation”, et mieux vaudrait sortir de l’Union européenne.
Au 1er janvier 2012, les tarifs de l’électricité grecque (troisièmes plus bas de l’UE selon Eurostat) augmenteront de 10 à 19%. Pendant ce temps, les administrations publiques affichent 141 millions d’euros de factures d’électricité impayées. Le ministère de la Santé, à lui seul, doit 4 millions d’euros à DEI. Les électriciens lui ont coupé la lumière pendant quatre heures mercredi 16 novembre.
(Source : Les Inrocks)
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